Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Put Your Jacket On And Go
24 mars 2010

285.

C'est la pause du midi, et mes collègues bataillent d'élastique et de blagues grossières.
Je veux du beau je veux du beau! J'appelle le beau en écartant fort les bras et en usant les fenêtres ensoleillées de mes regards. Dans ces cas là, je bénis ma semi-surdité. Mes oreilles se coiffent d'un casque, et je suis ailleurs.

Cet autre monde que j'appelle à l'envi, quel horizon infini! quel soleil éclatant et cette brise caressante la sentez-vous? Je pars, je suis partie si loin déjà...

Je regardais mon collègue manger ce midi, et je ne pouvais m'empêcher de penser: "Comme il mange mal!" et mes yeux se tournaient. Je m'en suis voulue de ce souci des apparences, de cette "bonne éducation" qui fait filtre sur des actes somme toute normaux. En réalité, je crois que ce qui m'a le plus choquée, ce ne sont pas cette main souillée ou cette bouche ouverte. C'est le tout, la manière de ne rien apprécier.
Mon collègue a conclu en grommelant: "et voilà, je vais faire la sieste: on croit gagner du temps en mangeant vite et finalement on en perd!"

Ça c'est sûr qu'il a mangé vite. Courbé sur son carton de pâtes, une si faible distance entre sa bouche et sa nourriture que la fourchette n'a plus qu'à osciller, il la remplissait comme on charge un camion en Afrique, trop. Puis il relevait la tête avec cette bouche trop pleine, et comment parler, alors?

Manger est une chose merveilleuse. C'est un plaisir de plusieurs sens, et la cuisine est considérée par certains comme un art tant ce que nous dit nos papilles peut nous toucher. Manger, ce serait comme regarder une peinture, écouter une belle musique. Vraiment? Pas selon mon collègue je crois.

Je ne sais pas si la cuisine peut-être un art, ce que je sais c'est le plaisir que je prends à manger. La vision d'une belle assiette, l'odeur du mets qui se présente, la fourchette qui pique les aliments, le premier goût en bouche, puis le deuxième, le troisième, et quand on a du vin! Tout est beau. Tout est une magnifique surprise. Tout est sentiment.

Par exemple, j'adore manger des trucs régressifs, j'ai déjà dû en parler: de la purée-saucisses, ce genre de choses. Croyez-vous que ce soit le goût du plat qui me fasse retomber en enfance? Oui, mais la texture, et le fait de le manger dans un bol, et les souvenirs à la manière de la madeleine de Proust...
Avez-vous remarqué que lorsque vous mangez du chocolat (du bon), une petite décharge électrique se produit au moment où le chocolat entre en contact avec l'intérieur de la bouche, la première fois?
Connaissez-vous ce goût divin du fromage que l'on prend avec du vin rouge? Des crevettes avec le vin blanc?
Et ces sauces qui vous donnent l'impression de manger chez les Rotshild le temps d'un rôti ou d'un gigot... Et cette quiche relevée de moutarde si douce au cœur qu'on s'invente une tante dans l'Est?

Alors moi bêtement, je veux du beau même quand je mange. J'aime faire mes rituels de célébration de cette "perte de temps" parce que ce moment rend la vie belle.

Publicité
Publicité
Commentaires
F
"Et ces sauces qui vous donnent l'impression de manger chez les Rotshild le temps d'un rôti ou d'un gigot..."<br /> <br /> chez Nadine ? Paye ton angoisse !<br /> <br /> "Et cette quiche relevée de moutarde si douce au cœur qu'on s'invente une tante dans l'Est?"<br /> <br /> La moutarde te monterais-t-elle au nez, ô douce Quiche ?<br /> <br /> ...<br /> <br /> tant pis.
Put Your Jacket On And Go
Publicité
Publicité