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C'est sûrement une torture de geek, les statuts les profils et tous ces trucs.
Autrefois, c'était si simple de couper les ponts, de perdre contact. Il suffisait de s'en aller. De ne pas laisser d'adresse. Aujourd'hui et malgré tous mes efforts, il existe encore de nombreux liens entre Pierre et moi.
Par hasard aujourd'hui, je l'ai vu connecté. Il était là, son petit rond vert et son message du jour. Il était là, regardant ses mails ou conversant avec je ne sais qui. Il était là, et moi aussi. Il aurait suffit d'un seul petit mot pour recréer un lien.
Je me suis dit: à quoi bon. 
Autrefois je me disais: Il n'en est pas question. C'est mauvais pour moi. De toutes manières il s'en fout. De l'orgueil, des blessures, de la peur.
Aujourd'hui je me suis dit: ça n'en vaut pas la peine. C'est trop de tracas. Ça ne m'intéresse même pas tellement, finalement: vais-je en tirer quelque joie? Non.
Peut-être - je ne crois pas - un jour lui voudra me revoir. Me recontacter. Ça lui sera très facile. Je crois qu'il ne le fera pas, pour la même raison que moi: à quoi bon. Nous ne nous remettrons jamais de sa lâcheté.

La conversation que nous aurions ressemblerait à ces échanges pitoyables des gens qui accomplissent leur devoir tout en rêvant de s'enfuir.
- Ah salut ça va.
- Oui et toi, qu'est ce que tu deviens.
- Pas grand chose, toujours pareil.
- Ah, oui, t'as fait ton trou à Lille?
- Oui pas mal et toi alors.
- Bah rien de neuf.
(silence clavistique de gens qui veulent se barrer parce qu'ils meurent d'ennui dêtre là - ou peut-être Pierre aura-t-il ces moments d'émotion qui le font trembler et perdre ses moyens, j'ai toujours trouvé ça adolescent)
- Cool alors t'as avancé dans tes projets
(s'il te plait ne reponds pas à cette fausse question je m'en fous vraiment)
(Ouf il ne répond pas )
(Cool il ne répond toujours pas vite je me déconnecte avant qu'il revienne pas besoin de lui dire "ça fait plaisir en tous cas, salut" ou "peut être à bientôt")

Voilà, le genre de conversation que nous aurions sûrement. A quoi bon. S'il était content et qu'il me racontait sa vie ce serait pire je crois. Vraiment, Ce n'ets pas que ça me fasse souffrir, c'est que ça m'ennuie profondément. Les vies des gens que j'aime, en qui j'ai confiance, avec qui j'ai une relation, m'intéressent.
Là, je m'en fous. J'ai même pas de curiosité. Ce serait juste gênant, parce que quand même on se connait et on est obligé d'être polis.

Dans l'idéal, la conversation qu'il entamerait avec moi serait:
- Ah salut ça va?
(Tiens, la braderie a moins bien marché que l'année dernière ils disent dans la voix du Nord)
- T'es là?
(je fais quoi ce soir? Ya un concert sympa à Wazemmes... tiens ça va sûrement tenter G.)
- Bon ben je te laisse
(Boarf je lui dis salut? Non, il va encore me parler.)

Vu comme ça on dirait une vengeance, je me rends compte. Mais non, c'est juste que... c'ets pas la peine. Ya rien à en tirer, c'est stérile, rien ne fleurira plus jamais sur cette terre là. Pourquoi s'acharner?

Et c'est une fois que je me suis dit tout ça que je réalise le chemin que j'ai parcouru. Combien j'ai changé. Comme je suis adulte, et ce que la vie m'a fait. Ouaou!